Les enjeux des enseignants en université à la rentrée 2020
La pandémie a accéléré radicalement la transition d’un enseignement « en présentiel » à un enseignement « en distanciel ». L’incertitude – sanitaire, économique et sociale – bouscule les habitudes et les points de repère de tous les acteurs : enseignants, étudiants, administrateurs et dirigeants. Nous avons avons interviewé la responsable numérique d’une université sur les conditions de rentrée.
La rentrée 2020 exige d’hybrider les formations, et de diviser les cohortes présentiel/distanciel. Or l’emploi du temps est organisé par la scolarité (service planification) qui n’arrive plus à gérer, avec les recommendations gouvernementales qui viennent se rajouter. Si bien que la plupart des cours finissent en distanciel sur Zoom. Les élèves enchainent parfois 8h de Zoom. Même les élèves les plus assidus en master témoignent qu’au bout de deux cours en visio-conférence, ils déconnectent et préfèrent apprendre seul. Autant dire que les L1, la population souvent la plus désengagée, est complètement perdue, il y a une vraie crainte à les perdre.
Pour le bien, il faudrait refaire entièrement le design pédagogique des cours, or les enseignants ne peuvent pas s’en occuper, car d’une part, ils n’ont pas le temps, d’autre part, ils ne sont pas payés pour le faire. Une fois qu’ils auront bien rôdés leurs nouveaux cours, il faut qu’ils animent leur communauté, compétence qu’ils n’ont pas toujours.
Une autre difficulté rencontrée par les enseignants concerne l’utilisation des outils numériques, par manque de temps, ils ne consultent pas les tutoriels, quand ils les consultent, ils ne les comprennent pas, car la documentation est souvent très technique, conçue par des informaticiens.
Au delà du problème pédagogique central, il y a une grosse frustration à ne pas arriver à communiquer avec les étudiants, les échanges informels dans les couloirs ou à la fin de la classe n’existent plus.
Se pose la question de l’accompagnement : Dans une université de 1700 professeurs, titulaires, directeurs de recherche, enseignants-chercheurs, vacataires, ils sont accompagnés par moins d’une dizaine de chefs de projets pédagogiques. Le centre de développement pédagogique aide les enseignants à concevoir leurs scénarios pédagogiques et leurs programmes de formation. D’un autre côté, le service numérique, très centré usage et expérience apprenant, accompagne les enseignants dans l’utilisation des outils pédagogiques. Ses services peinent à travailler ensemble étant donné leurs différences de fonctionnement.
Si le tableau semble noir, les initiatives se multiplient, des communautés centrées usages s’organisent, pour partager sur comment faire un cours magistral en ligne, comment faire un TD en distanciel, comment communiquer avec les étudiants …